vendredi 27 novembre 2009

Saucisse sèche


Je l'ai répété dix fois déjà, je suis originaire d'une famille ouvrière besogneuse, ancrée dans le terroir carolorégien entre terrils et petites maisons discrètes, potagers généreux et cultures populaires. Mon père, Nestor, faisait chanter ses fiers coqs le dimanche matin, en même temps que d'autres groupes de parieurs souvent pour quelques breloques emportées après une longue lutte bruyante, des sacs de charbon, des couvertures qu'il ramenait fièrement, un peu éméché souvent, juste pour le repas dominical du midi. L'homme avait, outre un tempérament bien trempé, rapidement fait montre d'une belle dextérité professionnelle qui l' avait ouvert à un poste à responsabilité. Il avait son équipe, "ses hommes", avec qui, il partageait le travail mais aussi les loisirs. J'ai donc appris avec lui ce que signifiait la camaraderie mais aussi les habitudes de la camaraderie. Ainsi, les retrouvailles de fin de semaine au cabaret de Gilly quatre-bras.
A l'époque, une commune prospère, vivante et rieuse, aujourd'hui désarmée par la crise et le chômage. Si les hommes, souvent nombreux, se renvoyaient les tournées de bière blonde aux lèvres, les femmes (ma mère et moi pour faire simple) nous contentions, pour rendre la soirée moins longue, d'accumuler, plutôt que des boissons alcoolisées, des barres de chocolat, des oeufs durs ou des saucisses sèches. De là, mon extraordinaire goût irrationnel et barbare pour les saucisses sèches fumées ou salées, fraîchement embossées ou parfumées des bactéries nobles. Aucune boucherie n'échappe à l'analyse. Il me faut goûter, croquer ou tirer sur la chair et la graisse de toutes les productions locales, régionales. Une voracité animale presque. Aujourd'hui toujours, les grelots aux noisettes du boucher local m'attirent mais les pipes d'Ardennes qu'on vend à quelques pas d'ici dans une petite épicerie sont parfaitement à mon goût.

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