mardi 19 août 2008

Gratin de sole et tomates.


Des filets de sole, quatre tomates, deux boules de mozzarella, du basilic, des câpres, un vin blanc sec du sel et du poivre, quelques couteaux aiguisés, un four en état de marche, un peu de patience, à peine trente cinq minutes pour la préparation et la cuisson.
J’aime regarder sans y toucher les ingrédients qui vont composer le plat. Les regarder en mesurant leur envie de résister à la chaleur, leur capacité de se marier les uns aux autres. Leur envie d’être découpés, coupés, broyés ou sauvés. J’aime marier les couleurs de l’avant-cuisson, de l’avant effeuillage. Il y a un temps avant d’ éplucher les ingrédients. J’aime sentir la différence entre la fraîcheur du poisson tout droit sorti du frigidaire et la tomate brûlante du soleil. J’aime sentir, j’aime toucher et j’avoue, j’aime ranger.Marier la tomate et le basilic.
Il est venu de l’Inde et du Moyen-Orient, par l’Italie, dans le sud de la France au XVème siècle. Maintenant, il est partout, plante aromatique très ordinaire, base de nombreuses sauces et petit pot indiscret tellement odorant... Le basilic est coupé dans l’urgence de son utilisation, il perd vite de sa saveur. Sans eau, il s’efface. Il est chargé de mille légendes et croyances. Il accompagne aussi bien le mort (son voyage vers l’au-delà sera facilité s’il tient entre les mains une branche de basilic) que le bon vivant. Il se charge d’éloigner mouches et moustiques... Allongé en fines lamelles sur la tomate, il attend l’huile. Pas pour la circonstance. C’est l’eau de la tomate, ici, qui amadoue le basilic.
Les filets du poisson sont levés. La sole est claire de chair et douce. Trop diront certains. Le poisson correspond à l’époque qui rechigne à s’encombrer de saveurs fortes et de chairs épaisses et dures. Je les dépose sur les tomates comme il faut écrire les pages d’un livre. Je les couche comme sur un lit, sachant que le poisson ne va pas s’endormir, titillé par la chaleur et les épices, par le vin sec.Le vin vient mouiller, il vient ouvrir comme le ferait le citron. Il vient provoquer le mariage. Il faut lui jeter dessus les épices pour le refermer sur la chair du poisson. Le poivre en gros grains noirs et le sel.
La mozzarella est un fromage frais à pâte filée, à base de lait de bufflonne, de saveur douce et acidulée issu des régions de Campanie ou des Pouilles. J’ai appris à le marier avec l’huile d’olive et la tomate. Ici, elle va s’encroûter sous le grill et se fixer dans la sole. Un mariage d’amants.Le repas est long, soutenu par une purée de nicolas. Les câpres sont subtilement chargés de donner de la légèreté et de la fraîcheur à chaque bouchée. Un Sèvre et Maine pour faire les liens en bouche. Dehors le pluie s’est mise à battre les fenêtres et l’avion de ma Caro ne sera pas à Chicago avant deux heures encore.

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